Comment peut-on sélectionner des plantes spécifiques comme étant des plantes de la magie ou même des plantes magiques ?
Nous le savons, nous les herboristes, les proches des plantes de médecine : elles sont toutes magiques. Quand la bonne plante rencontre la bonne personne au bon moment, les étincelles de guérison qui se produisent sont des reflets d’une magie si profonde, si ancienne et si persistante que toutes les lois et les règlements du monde n’arriveront pas à la menacer. Nous ne pourrons jamais nous séparer des plantes car elles font partie de nous comme nous faisons partie d’elles. La simple existence des plantes est magique comme l’est le fait que nous soyons en symbiose et en interrelation aussi intime, tout en étant si différemment constitués, d’un règne à l’autre.
Les plantes sont magiques. Elles sont des grands mages qui savent, lorsque nous les accueillons, établir une communication, une communion et une transmutation de forces, une inexplicable alchimie du vivant. Elles n’ont pas la limite que nous leur supposons. Tous ceux et celles qui, depuis l’aube des temps, se sont penchés sur elles avec l’attitude juste, le respect et l’humilité requis, ont reçu et reçoivent encore d’elles des enseignements extraordinaires. De cette connaissance du dedans jaillit ce qui peut sembler magique, mais qui est en réalité le fruit de leur profonde et inaliénable amitié pour nous, les humains.
Nous avons besoin du point de vue unique des plantes.
La base même de la magie, c’est la capacité de penser et d’agir à partir de l’unité. La magie est un processus qui permet de créer des liens, des alliances.
Au centre de toute chose et de tout être, il y a l’esprit, une force unificatrice sacrée qui sous-tend tout ce qui est. Toute matière provient de cette substance.
Le sacré se manifeste dans le physique. Parce que toute matière est composée du sacré, toute chose possède une âme, une intelligence sacrée, un logo. Parce que l’être humain est aussi composé à partir de cette même substance, il lui est possible de communiquer avec l’intelligence ou l’âme des plantes et de toute autre matière créée, et il leur est possible, en retour, de communiquer avec l’humain.
C’est une faculté que nous avons tous et dont nous nous servons tous à notre façon.
Pour les plantes, nos grandes amies, une de leur ultime magie est toute simple : Elles recréent les mêmes danses depuis des temps immémoriaux et nous aident à nous souvenir. Elles nous aident à retrouver aussi bien des mémoires de la petite enfance que des mémoires des origines de notre vie et, du fait même, des origines de la vie.
Comment se révélaient les dons des plantes, à l’origine, avant que la transmission orale ne se mêle de s’assurer de la continuité ? Je vous dirai que c’étaient les plantes elles-mêmes qui se révélaient.
Chaque herboriste dont le coeur est ouvert par l’amour des plantes peut et doit recevoir leurs révélations. On ne sait pas tout de la plante parce qu’on est au courant de la tradition… Il est des choses qui ne se transmettent pas. Il est des proximités auxquelles les mots ne peuvent rendre hommage.
Le monde dans lequel nous évoluons est profondément vivant, et donc profondément magique. On ne sait rien de la vie en disséquant les plantes. On en apprend bien davantage en les regardant vivre au fil des ans. On peut tout apprendre quand on considère les plantes comme des maîtres. Elles peuvent faire de la magie, de la vraie magie, et l’on n’a pas même besoin de les ingérer pour le ressentir.
La magie, c’est que la terre soit vivante. Tout entière. Et nous dedans. Qu’il n’existe pas cette division qu’on a créée entre êtres animés et êtres inanimés. Que tout est composé de vie. Que la vie est l’âme de tout ce qui est. Pour faire de la magie, il faut se prosterner devant la vie qui est devant nous. Vénérer la plante alliée, la pierre amie, la chaleur, la fumée, le ciel et la terre, les animaux de toutes sortes. Ceci prend le temps de l’apprivoisement.
Faire un feu, c’est magique. Faire une tisane, c’est magique. La prendre et la digérer, c’est magique. En ressentir un bienfait, c’est magique. En guérir, c’est magique.
Je revendique le droit de faire de la magie. La magie n’est que ce qu’on ne réussit pas à exprimer avec des mots ou qu’on choisit de ne pas mettre en mots pour en préserver toute la pureté. Faire un élixir de fleur et l’offrir en le vaporisant à une terre massacrée, à une coupe à blanc, c’est faire de la magie blanche.
Volume 7, Numéro 4, Automne 2009.
Danièle LABERGE, herboriste traditionnelle.
www.armoireauxherbes.com